Le samedi 09 avril 2005
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Photo: Rémi Lemée, La Presse Sébastien Izambard, Carlos Marin, Urs Buhler et David Miller forment Il Divo |
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Il Divo
La pop-opéra selon Simon Cowell
Émilie Côté
collaboration spéciale, La Presse
Quatre
beaux gosses dans la trentaine, vêtus de vêtements Armani des pieds à
la tête. Ils chantent de la pop-opéra, en anglais, en italien et en
espagnol. Le nom de leur quatuor, Il Divo, signifie «divas mâles». Un big boys band au concept préfabriqué? Tout à fait.
Et ce n'est pas l'expression
d'une opinion personnelle: avant même que les membres d'Il Divo se
rencontrent, leur répertoire et leur look étaient convenus de A à Z, par nul autre que Simon Cowell. Oui, le redoutable juge d'American Idol.
Pendant deux ans, Mr Nasty en personne a tenu des auditions aux quatre
coins du monde pour dénicher des hommes aux allures de mannequin
pouvant faire vibrer leurs cordes vocales à la manière d'Andrea Bocelli.
Ses trouvailles? David Miller, 31 ans, ténor américain. Urs Buhler, 33
ans, ténor suisse. Carlos Marin, 35 ans, baryton espagnol. Puis
Sébastien Izambard, 31 ans, le seul provenant de l'univers de la
musique pop, français d'origine.
En regardant les photos de la pochette de presse du groupe, les quatre
hommes semblent poser pour Giorgio Armani. Ce n'est pas complètement
faux, puisque la maison du célèbre couturier fournit tous les complets
qu'ils enfilent. La création d'une Il Divo collection est même dans
l'air.
Mais
leur métier est d'abord de chanter. Jusqu'à présent, leur album éponyme
a été écoulé à plus de 1,25 million d'exemplaires, uniquement en
Angleterre. L'expérience et la notoriété de Simon Cowell obligent, une
importante machine commerciale est derrière Il Divo. Une machine très
efficace: durant la semaine suivant la sortie de leur (premier) disque
(qui sort le 19 avril au Québec), les ventes ont surpassé celles du Greatest Hits de la star anglaise Robbie Williams. C'est tout dire...
Urs Buhler et Sébastien Izambard n'avaient aucune idée de qui était
Cowell avant de passer l'audition pour faire partie du groupe, ont-ils
expliqué en entrevue, dans un chic hôtel montréalais. «Quand je suis
arrivé en Angleterre et que je disais aux gens que j'allais travailler
avec Simon, ils croyaient que je plaisantais et me disaient qu'il était
insupportable, qu'on le nommait Mr Nasty, raconte Sébastien. Je me
disais merde, je n'ai pas envie de travailler avec un type comme ça.»
«Mais avec nous, il est super cool, poursuit le chanteur. Il nous a dit voilà, je ne connais rien à l'opéra. Vous avez entre 10 et 15 années d'expérience, donc allez-y. Il a eu une idée et nous l'avons concrétisée.»
À peine deux jours avant de commencer l'enregistrement de leur album
éponyme, les quatre figures d'Il Divo faisaient connaissance pour la
première fois. «La plupart des chansons étaient décidées d'avance,
explique Urs. Mais les arrangements de voix, les harmonies, viennent de
nous. Nous avons également suggéré My Way.»
Son acolyte français ne cache pas qu'il y a eu une période
d'adaptation. «Sauf David, l'anglais n'est pas notre première langue.
On n'arrivait pas toujours à traduire ce qu'on voulait dire et il y
avait parfois des mauvaises interprétations. Aussi, nos cultures sont
vraiment différentes... Mais c'est comme une équipe de football. Il
faut bien se connaître avant de passer le ballon et de marquer des
buts.»
C'était il y a près d'un an. Depuis, inutile de souligner que la vie
des membres d'Il Divo a changé du tout au tout. Premièrement, tous ont
dû déménager dans le pays de Tony Blair, où les journaux à potins
pullulent. «Nous avons un appartement en Angleterre, mais on ne le sait
pas, signale Sébastien. On n'y est jamais. En fait, notre appartement,
ce sont les hôtels et les aéroports.»
La vie de nomade est loin d'être terminée: après la promo planétaire,
Il Divo enregistrera un deuxième album cet été; une tournée mondiale
devrait suivre. Et à l'heure actuelle, sans que les membres en soient
nécessairement conscients, leur destin américain vient probablement de
basculer. Lundi dernier, c'était la diffusion du passage du groupe à The Oprah Winfrey Show. Le quatuor était annoncé comme «the next big thing» sur le site Internet de l'émission.
Comme à l'habitude, la foule était hystérique et Oprah, à la limite de
la complaisance. «Elle nous a accueillis comme des rois, raconte
Sébastien. Nous ne devions chanter qu'une chanson, mais une fois en
jeans, on nous a rappelés pour revenir chanter. C'était hallucinant.
Nous n'avions jamais vu ça.»
«Apparemment, c'est incroyable l'influence qu'elle a, poursuit Urs. Si
Oprah dit avoir aimé tel livre, il devient un best-seller le lendemain.
En Angleterre, nous n'avions aucune idée de ce qu'était le Parkinson Show avant d'y aller. Et la répercussion que cela a eue...»
Avec des visites également prévues aux émissions de Jay Leno et de
Regis & Kelly, on peut prévoir sans se tromper que l'Amérique
ouvrira grandes ses portes à Il Divo. D'autant plus que le premier
extrait, Regresa a mi, se veut une reprise de Unbreak My Heart, le grand succès de Toni Braxton.
Les chansons de l'album ont la recette pour rallier un vaste public. Le
public qui apprécie des voix tout en puissance et une réalisation
«trame sonore» - pop orchestrale très propre, arrangements romanesques,
bridges bien senties - sera ravi par l'album d'Il Divo, dont la pièce Nella Fantasia, reprend par ailleurs la mélodie du film The Mission (signée initialement par Ennio Morricone).
À l'opposé, d'autres trouveront que les montées émotives de violon,
ponctuées d'accords de guitare latino-gitans, sont trop sirupeuses.
Mais qu'importe: «They are going to be huge», avait prédit Simon Cowell, l'été dernier. On n'en doute pas une seconde.